Par Maëlle Joulin. Article mis à jour le 20 février 2023
Vous êtes à la recherche de la meilleure solution pour valoriser vos biodéchets, déchets organiques et déchets alimentaires ?
Votre entrée dans le monde du traitement des biodéchets vous a alors sûrement amené à tomber sur des sites proposant des sécheurs, des déshydrateurs, en résumé des machines qui en 24h transformeraient les déchets alimentaires de vos restaurants en « compost »…
Evidemment en comparaison avec un composteur micro-industriel qui a besoin de 15 jours pour traiter les biodéchets, vous avez de quoi hésiter.
Pourquoi attendre 15 fois plus longtemps pour avoir exactement le même produit ?
Tout simplement parce que ce fameux produit obtenu après passage en sécheur, déshydrateur, n’est pas (et ne sera jamais) du compost !
Fortement sollicité par nos clients pour une clarification, nous rendons publique notre réponse en espérant qu’elle pourra éclaircir le débat.
FICHE PRATIQUE | Composteurs VS Sécheurs : on refait le match ! >>
Le séchât n’est ni du compost ni de l’engrais selon l’ADEME
C’est ce qu’indique très clairement l’ADEME[1] :
« Après réflexion, il a été décidé, en relation avec le Min. de l’Environnement et le Min. de l’Agriculture, que le traitement réalisé par ces machines ne pouvait en fait pas être considéré comme un compostage caractérisé, et que donc, quelles que soient ses caractéristiques, le déchet résultant ne pouvait pas être défini par la norme NF U 44-051 : ce n’est pas du compost car le traitement réalisé n’est pas du compostage. »
L’ADEME précise que le séchât obtenu n’est pas non plus assimilable à de l’engrais (NF U 42-001) « le déchet résultant n’est donc pas non plus un engrais organique normé 42-001 car les déchets de cuisine ne sont plus dans la liste des déchets admis pour la fabrication d’un engrais organique. »
Pour qu’un déchet se transforme en compost il faut qu’il se soit dégradé naturellement par des bactéries, sous leur action il subit une transformation, s’auto-échauffe et change fondamentalement de structure physique et chimique. Tout ce processus ne peut pas être obtenu en 24h ! [1]
Maximilien Koegler, responsable R&D chez UpCycle nous explique tout en 3 questions
1- Pourquoi est-il impossible d’obtenir du compost en 24h, même avec ajout de bactéries ou ferment comme le vendent certains distributeurs de sécheurs ?
MK : Le compostage est un processus de traitement des biodéchets qui prend du temps car il s’adapte à un rythme quasi-immuable qui est celui de la nature. Pour digérer une matière les micro-organismes doivent la travailler : elles colonisent la matière, se multiplient et redoublent d’effort pour la « cuisiner » tout en éliminant des concurrents. Cette fameuse « cuisine » implique de changer le déchet pour le rendre assimilable : il est découpé, transformé physiquement et chimiquement par des bactéries qui finissement par l’auto-échauffer naturellement.
Si les micro-organismes arrivent à faire ça tout seuls, c’est parce qu’ils arrivent à devenir extrêmement nombreux : on dit pour simplifier qu’une bactérie se divise en deux toutes les 20 minutes environ, donc en 15 jours au lieu d’un seul, ce n’est pas juste 15 fois plus de bactéries qui ont travaillé pour composter mais un chiffre exponentiel tellement grand qu’Excel ne veut même pas me dire combien.
Deux choses très importantes sont donc à retenir sur le sujet :
Le temps naturel nécessaire pour faire du compost ne peut pas être de moins de 15 jours. C’est déjà un temps très optimisé qui ne donne qu’un compost « prématuré » qui doit ensuite reposer. Si le déchet semble avoir un aspect proche du compost en 24h, ce n’est pas parce que des bactéries ont travaillé mais parce qu’on a dépensé beaucoup d’énergie pour « cuire » (déstructurer et sécher) la matière à leur place. Cette énergie dépensée a d’ailleurs un coût bien visible sur la facture d’électricité.
2- Du coup si le produit issu d’un sécheur n’est pas du compost, c’est quoi ?
MK : C’est de la poudre… de déchet, communément appelée « séchat ». C’est son aspect qui apporte une ambiguïté sur la nature de cette matière, car elle ne sent rien et a une couleur brune proche du compost : un vrai trompe-l’œil !
Mais cette matière reste du déchet :
d’abord d’un point de vue physique : si vous l’utilisez et le mouillez, il reprendra une dégradation rapide, de l’odeur pas forcément agréable et attirera probablement des nuisibles ;
ensuite d’un point de vue légal : c’est écrit noir sur blanc, l’ADEME et des autorités judiciaires ont statué pour toutes les raisons précédemment évoquées : c’est un déchet qui n’a pas subi de traitement, les entreprises commercialisant des sécheurs et parlant de compost sont dans l’illégalité.
3- Le séchât ne peut donc pas être utilisé tel quel ?
MK: Non ! Le séchât doit être ensuite traité et valorisé soit par compostage, soit par méthanisation. Il prendra certes moins de place puisqu’il perd 80% de son volume en séchant mais il devra être collecté et amené dans un centre de traitement adéquat. Vous n’avez même pas le droit de l’utiliser dans vos propres espaces verts (et on vous le déconseille !)
C’est aussi là que se trouve la différence fondamentale avec les solutions de compostage sur site. Alors que la loi interdit le retour au sol direct des « séchats », elle facilite celui des compost qui n’ont même pas besoin de normage sur les petits sites. Il suffit d’un simple normage pour pouvoir revendre le compost.
[1] https://www.optigede.ademe.fr/sites/default/files/Procedes_de_sechage_de_dechets_de_restauration.doc.pdf
FICHE PRATIQUE | Composteurs VS Sécheurs : on refait le match !
Sans polémique, de façon factuelle retrouvez dans ce tableau de quoi comparer les composteurs micro-industriels et les machines type « sécheurs » ou « déshydrateurs » en un clin d’œil et selon différents critères tels que le coût, la place nécessaire, le produit obtenu.
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